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Pour ou contre le téléchargement ?

Cette semaine a été d’une rare violence sur internet. Entre le blackout day anti SOPA et la fermeture, le lendemain, de Megaupload, immédiatement suivi par une série d’attaque DDOS, sobrement nommées #OpMegaupload, c’était la guerre. Cette semaine aura donc eu pour effet de cristalliser les différentes visions d’internet.

Quelles sont-elles ces visions ? Grosso modo, on a d’un côté les défenseurs d’un internet neutre, libre et ouvert, et de l’autre, ceux qui veulent un internet « civilisé », et qui veulent imposer les moyens de le civiliser. Et comme civiliser internet, c’est le vider de tous les fichiers piratés, c’est le moment d’avoir une vrai réflexion sur le téléchargement illégal.

Petit tour des arguments

Malheureusement, bien souvent, les arguments se résument à :

Vous me l’accorderez, avec ça, on n’est pas bien avancé. Heureusement, internet est quand même peuplé de gens intelligents, et certains ont des points de vue plus qu’intéressants. Chez Korben par exemple, on défend toujours le téléchargement, envers et contre tout, et au nom de la neutralité d’internet. Alors tonton Korben, tord ou raison, je ne saurai pas dire. Par convenance, on penche facilement pour le téléchargement (je ne suis qu’un simple internaute), en revanche, ce qui est certain, c’est que la neutralité, il faut la défendre jusqu’à la mort, et là dessus, Korben, il a tout compris. Le gros soucis dans ce gigantesque débat, c’est qu’on manque franchement de nuance. Comme je le disais juste avant, d’un côté “télécharger c’est le mal”, de l’autre, “télécharger c’est bien et c’est l’esprit du partage et du net”. Les deux vidéos ci-dessous illustrent très bien la chose : aucun sens du compromis, de la nuance, ou de la modération :

La version des anti-partage :

La version des pro-partage :

Voilà, vous l’avez compris, on est pas trop dans la nuance, ni d’un côté, ni de l’autre, chacun défend son point de vue avec des comparaisons faisant office de démonstrations.

A l’inverse, chez turblog (infiltré chez Hadopi), on reste pour le téléchargement mais avec un point de vue tout en nuance, qui explore les différents aspects du téléchargement. Il va justement nous parler de l’évolution de l’intermédiation (internet fait sauter les intermédiaires puisqu’on peut télécharger directement, d’où le problème actuel). Puisqu’on est chez lui, il a aussi fait une intéressante petite étude statistique sur les raisons du piratage.

Faisons la part des choses

Nous y voilà, on entre dans la partie analyse, qui je l’espère, nous permettra de savoir si on est pour, ou contre le téléchargement illégal, ou même les deux ! On note que même dans les discours partisans des deux bords, on trouve des arguments très logiques et tout à fait recevables. C’est vrai que pour les tenants du partage, copier n’est pas voler. En effet, dans le vol, il y a une notion de spoliation de l’objet. Si quelqu’un me vole ma voiture, je ne l’ai plus, je ne peux donc plus m’en servir. Or ce schéma ne correspond pas tout à fait à la réalité d’internet. Et pour cause, lorsqu’on télécharge une musique, ça en créé un exemplaire supplémentaire, et finalement, personne n’est réellement spolié. En revanche, est-ce que cela signifie que personne n’est lésé ? Les industries culturelles vous répondrons qu’il y a quand même un manque à gagner, puisque tout ce qui est téléchargé n’est pas acheté. Ensuite, de là à savoir si ce qui a été téléchargé aurait été acheté ou pas, il faut être voyant, devin ou sorcier pour le savoir, et croyez moi, je n’en suis pas un, si si je vous le jure !!

Au final, même si ces industriels perdent de l’argent, on peut légitimement se demander si ce n’est pas tout simplement de leur faute. Leur business model est has been, ils n’ont pas su le renouveler, et tant pis pour eux. Si aujourd’hui on se passe de leur service, c’est qu’ils sont devenus totalement inutiles. On a le récent exemple de la faillite de Kodak. Ils n’ont pas su se renouveler avec le virage numérique, plus grand monde n’avait besoin de leur produit, voilà, au revoir. Personne n’est venu leur créer une Hadopi en arguant que le numérique et les cartes SD présentaient un manque à gagner pour eux ! STOP

Voilà ce qui nous attends si nous continuons à télécharger… Nous n’aurons plus de culture. Alors si on peut se passer des pellicules Kodak à l’air du numérique, la culture, c’est indispensable. Re-STOP ! Ce ne sont pas les majors qui produisent la culture, ce sont les artistes. Et quand on voit le pourcentage reversé aux artistes à partir d’une vente de CD, on se dit que ce n’est pas là-dessus qu’ils font leur beurre. Un artiste, c’est en faisant des concerts qu’il gagne sa vie, les CD (ou enregistrements dématérialisés) pouvant être considérés comme des objets de promotion. Ça c’est un des arguments des pro-partage, et je le fais mien. Ça ne vous est jamais arrivé de découvrir un artiste via le P2P ou une vidéo sur youtube, et d’aller finalement les voir en concert. Dans le même ordre d’idée, pour l’industrie du film, ce sont les entrées en salles qui opèrent le retour sur investissement. D’ailleurs, les chiffres en haussent des achats de places de concerts et de fréquentation des salles de cinéma montrent que le téléchargement ne nuit pas tant que cela à l’industrie culturelle, mais les chiffres, on les interprète bien comme on veut. Il n’y a finalement qu’un glissement des dépenses qui s’opère des biens (CD/DVD/achat mp3) vers des prestations (concert/cinéma), je ne crois pas que l’industrie y perde trop, les artistes y gagnent certainement, et le consommateur en revanche, lui, à tout à y gagner.

Une histoire de business model

En ce qui concerne la situation actuelle - téléchargement de films et musiques en P2P et direct download au détriment des plateformes légales - j’ai envie de dire bien fait. Eh oui les cocos, le consommateur attendait que vous lui proposiez quelque chose, seulement voila, vous n’avez rien su lui proposer, vous vouliez vendre des CD, point. Lorsque vous avez compris que le consommateur était dorénavant un internaute, vous lui avez proposé des plateformes légales, mais avouons-le, vous vous êtes bien foutu de sa gueule avec les DRM. Pendant ce temps, d’autres ont développé des solutions qui répondaient aux besoins des internautes, et voila, on s’y est habitué, aujourd’hui vous débarquez avec vos gros souliers en faisant la même chose que ce qui existe aux quatre coins du nets, mais en plus vous exigez des internautes qu’ils vous payent… désolé les gars, mais l’internaute ne paye pas pour le même truc qu’il peut avoir for free, pour ça il faut proposer un plus ! À l’image d’iTunes, ils ont une solution clefs en main, dans laquelle le store est intégré à la bibliothèque musicale et aux appareils de la marque, l’offre est simple et complète, et ça marche, alors soyez créatifs les mecs !!

J’ai un peu digressé, excusez-moi, j’ai fait un point causes. Une introduction du problème de business model en fait. Si les majors n’encaissent plus grand chose par la vente, c’est que leur business modèle n’est pas viable, c’est tout. Alors bon, comme je l’explique plus haut, au final, ça n’est pas dramatique puisque d’une part, ils ont la possibilité de se renouveler s’ils font preuve de créativité, au lieu de se reposer sur leurs lauriers, d’autre part, ce qui est important c’est de préserver la création, et nous avons démontré que les ventes de CD et DVD ne remettent pas en cause la rémunération des artistes, bien au contraire.

Le problème, et c’est en ce point que je diverge avec le “télécharge à fond c’est l’esprit du partage”, c’est qu’il y a d’autres domaines artistiques que le cinema et la musique qui sont confrontés au problème du téléchargement illégal. Je pense notamment aux auteurs, avec l’arrivée massive des ebooks, le téléchargement court-circuite le circuit traditionnel de rémunération de l’auteur. Nous passerons sur les abus des éditeurs qui, au même titre que les majors du disque, prélèvent des sommes indues sur les ventes numériques, alors que l’unité supplémentaire ne coûte rien. En revanche, tandis que les musiciens peuvent faire des concerts et que les entrées en salles rapportent de l’argent pour le cinéma, l’auteur tire sa rémunération de la seule vente de ses livres. Contrairement aux marchés de la musique et du cinéma, le problème du piratage commence à peine pour celui du livre, tentons donc de trouver des solutions intelligentes tant qu’il en est temps, au lieu de reproduire les erreurs des autres industriels en essayant vainement de tout bloquer et de tout DRMiser. C’est là qu’il faut réfléchir à un business model viable à l’heure du partage global. Donc puisqu’il est à mon avis difficile, voire impossible, de lutter contre le partage gratuit des œuvres entre les internautes, mettons en place d’autres systèmes de rémunération. Amazon place par exemple de la publicité sur son Kindle, si tous les livres étaient gratuits sur son ebookstore, il y aurait bien plus d’affluence, les revenus publicitaires grimperaient, et ce serait Amazon qui rémunérerait les auteurs. On rejoint finalement un peu le modèle de la radio, la radio diffuse les musiques gratuitement, l’auditeur ne paye rien, mais la radio tire ses recettes de la publicité et elle en reverse une partie aux auteurs des musiques. Il y a bien d’autres solutions à envisager, le tout, c’est de réfléchir à de nouvelles manières de monétiser la richesse qu’est la culture.

Conclusion

Donc en conclusion, le téléchargement oui ! Et je dirai même vive la légalisation du téléchargement illégal ! En revanche, il faut trouver des moyens pour rémunérer les artistes qui méritent salaire (pour les majors, s’ils ne se trouvent pas une valeur ajoutée, ils ne méritent pas salaire). Qu’en pensez vous ? Vous avez des idées de monétisation ?

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